Phèdre est une tragédie en cinq actes et en vers de Jean Racine créée le 1er janvier 1677 à Paris sous le titre Phèdre et Hippolyte. La pièce comporte 1 654 alexandrins. Racine évoque ses sources, et principalement le poète grec Euripide (484-406 av. J.-C.), qui dans sa tragédie Hippolyte (428 av. J.-C.) avait traité le mythe de Phèdre ..
HIPPOLYTE
Madame, pardonnez. J’avoue, en rougissant,
Que j’accusais à tort un discours innocent.
Ma honte ne peut plus soutenir votre vue,
Et je vais…
PHEDRE
Ah ! cruel, tu m’as trop entendue !
Je t’en ai dit assez pour te tirer d’erreur.
Eh bien ! connais donc Phèdre et toute sa fureur.
J’aime. Ne pense pas qu’au moment que je t’aime,
Innocente à mes yeux, je m’approuve moi−même,
Ni que du fol amour qui trouble ma raison,
Ma lâche complaisance ait nourri le poison.
Objet infortuné des vengeances célestes,
Je m’abhorre encor plus que tu ne me détestes.
Les dieux m’en sont témoins, ces dieux qui dans mon flanc
Ont allumé le feu fatal à tout mon sang ;
Ces dieux qui se sont fait une gloire cruelle
De séduire le coeur d’une faible mortelle.
Toi−même en ton esprit rapelle le passé.
C’est peu de t’avoir fui, cruel, je t’ai chassé :
J’ai voulu te paraître odieuse, inhumaine,
Pour mieux te résister, j’ai recherché ta haine.
De quoi m’ont profité mes inutiles soins ?
Tu me haïssais plus, je ne t’aimais pas moins.
Tes malheurs te prêtaient encor de nouveaux charmes.
J’ai langui, j’ai séché, dans les feux, dans les larmes.
Il suffit de tes yeux pour t’en persuader,
Si tes yeux un moment pouvaient me regarder.
Que dis−je ? Cet aveu que je te viens de faire,
Cet aveu si honteux, le crois−tu volontaire ?
Tremblante pour un fils que je n’osais trahir,
Je te venais prier de ne le point haïr.
Faibles projets d’un coeur trop plein de ce qu’il aime !
Hélas ! je ne t’ai pu parler que de toi−même !
Venge−toi, punis−moi d’un odieux amour ;
Digne fils du héros qui t’a donné le jour,
Délivre l’univers d’un monstre qui t’irrite.
La veuve de Thésée ose aimer Hippolyte !
Crois−moi, ce monstre affreux ne doit point t’échapper.
Voilà mon coeur : c’est là que ta main doit frapper.
Impatient déjà d’expier son offense,
Au−devant de ton bras je le sens qui s’avance.
Frappe. Ou si tu le crois indigne de tes coups,
Si ta haine m’envie un supplice si doux,
Ou si d’un sang trop vil ta main serait trempée,
Au défaut de ton bras prête−moi ton épée.
Donne.
HIPPOLYTE
Madame, pardonnez. J’avoue, en rougissant,
Que j’accusais à tort un discours innocent.
Ma honte ne peut plus soutenir votre vue,
Et je vais…
PHEDRE
1- Ah ! cruel, tu m’as trop entendue !
2 – Je t’en ai dit assez pour te tirer d’erreur.
3 – Eh bien ! connais donc Phèdre et toute sa fureur.
4 – J’aime. Ne pense pas qu’au moment que je t’aime,
5 – Innocente à mes yeux, je m’approuve moi−même,
6 – Ni que du fol amour qui trouble ma raison,
7 – Ma lâche complaisance ait nourri le poison.
8 – Objet infortuné des vengeances célestes,
9 – Je m’abhorre encor plus que tu ne me détestes.
10- Les dieux m’en sont témoins, ces dieux qui dans mon flanc
11- Ont allumé le feu fatal à tout mon sang ;
12- Ces dieux qui se sont fait une gloire cruelle
13- De séduire le coeur d’une faible mortelle.
14- Toi−même en ton esprit rapelle le passé.
15- C’est peu de t’avoir fui, cruel, je t’ai chassé :
16- J’ai voulu te paraître odieuse, inhumaine,
17- Pour mieux te résister, j’ai recherché ta haine.
18- De quoi m’ont profité mes inutiles soins ?
19- Tu me haïssais plus, je ne t’aimais pas moins.
20- Tes malheurs te prêtaient encor de nouveaux charmes.
21- J’ai langui, j’ai séché, dans les feux, dans les larmes.
22- Il suffit de tes yeux pour t’en persuader,
23- Si tes yeux un moment pouvaient me regarder.
24- Que dis−je ? Cet aveu que je te viens de faire,
25- Cet aveu si honteux, le crois−tu volontaire ?
26- Tremblante pour un fils que je n’osais trahir,
27- Je te venais prier de ne le point haïr.
28- Faibles projets d’un coeur trop plein de ce qu’il aime !
29- Hélas ! je ne t’ai pu parler que de toi−même !
30- Venge−toi, punis−moi d’un odieux amour ;
31- Digne fils du héros qui t’a donné le jour,
32- Délivre l’univers d’un monstre qui t’irrite.
33- La veuve de Thésée ose aimer Hippolyte !
34- Crois−moi, ce monstre affreux ne doit point t’échapper.
35- Voilà mon coeur : c’est là que ta main doit frapper.
36- Impatient déjà d’expier son offense,
37- Au−devant de ton bras je le sens qui s’avance.
38- Frappe. Ou si tu le crois indigne de tes coups,
39- Si ta haine m’envie un supplice si doux,
40- Ou si d’un sang trop vil ta main serait trempée,
41- Au défaut de ton bras prête−moi ton épée.
42- Donne.
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www.cliffsnotes.com Summary and Analysis Act II: Scenes 5-6
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Hippolytus:
Madame, forgive me. I blush at my confession
I’ve wrongly judged an innocent expression.
My shame can no longer endure your vision:
And I go…
Phaedra:
Ah! You’ve listened too long, cruel one.
I’ve told you enough for you to be undeceived.
Well! Contemplate Phaedra then in all her fury.
I love. But don’t think at the moment of loving you
I find myself innocent in my own eyes, or approve,
Or that slack complacency has fed the poison,
Of this wild passion that troubles all my reason.
I, the wretched object of divine vengeance,
Loathe myself much more than you ever can.
The gods are my witnesses, those gods who placed
The fire in my breast, so fatal to all my race,
Those gods whose glory it is, always cruel,
To seduce the heart of a weak mortal.
You yourself can bring the past the mind, too,
It was not enough to avoid you: I exiled you.
I wished to seem odious, inhuman to you.
I sought your hate, the better to resist you.
How have those useless efforts brought success?
You hated me more: I did not love you less.
Your misfortune even lent you fresh dimension.
I languished, withered, in tears, and in passion.
You only needed eyes to be persuaded,
If your eyes had looked at me, not been dissuaded.
What? This confession that I so shamefully,
Make to you, do you think it voluntary?
Trembling for a son I did not dare betray,
To beg you not to hate him I come today.
Weak project of a heart too full of what it loves!
Alas! It is only yourself I have spoken of.
Take vengeance: punish me for loathed delight.
Worthy son of a hero who granted you light.
Deliver the world from a monster so odious.
Theseus’ widow dares to love Hippolytus!
This dreadful monster won’t escape: believe me.
Here’s my heart. Here’s where your hand should strike me.
Impatient already to expiate its offence,
To meet your arm I can feel it now advance.
Strike. Or if you think it not worthy of your blow,
If your hate refuses me such sweet torment, so,
Or if your hand by my vile blood would be stained,
Instead of your arm lend me then your blade.
Offer it.
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Lecture analytique de l’acte II, scène 5 de Phèdre de Racine,
la scène dite de l’aveu de Phèdre
Le Bac Français (Ajoutée 2016)
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aveu à Hippolyte.wmv
Ajoutée a YouTube par nicolasricome 2010
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Jean RACINE – Grands rôles : Phèdre (ARTE, 2008) – YouTube
Quatrième documentaire d’une série de six consacrée aux grands rôles du théâtre. Dans ce numéro diffusé sur Arte, le 12 octobre 2008, Agathe Berman interviewe des metteurs en scènes, comédiens, traducteurs et philosophes sur leur perception du personnage de Phèdre. Invités : Daniel Mesguich, Dominique Blanc, Michel Schneider, Philippe Adrien, Georges Forestier.
Mise en ligne par Arthur Yasmine, poète vivant, dans l’unique objet de perpétuer la Poésie française.