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David Haziot : Van Gogh et Gauguin une rencontre destructrice
La rencontre de deux artistes n’est pas toujours féconde. Celle de Gauguin et Van Gogh, à Arles, eut des conséquences bien plus dévastatrices pour les deux hommes qu’un banal abandon des muses. David Haziot nous explique comment une collaboration qui avait tout pour être fructueuse a tourné au drame.
https://www.youtube.com/watch?v=hm9WFcPKzrs
La proposition de le faire venir a Arles remonté au printemps
0:12 Van Gogh, pour recevoir Gauguin,
0:16 se met à dépenser des sommes considérables
0:19 pour meubler sa petite maison jaune
0:23 pour recevoir le dignitaire qui doit arriver
0:27 le véritable pape de la peinture qui arrive
0:30 le chef qui va être le chef de l’atelier
0:34 du midi qui va commencer
0:36 grâce à lui, et l’autre n’arrive pas
0:40 c’est en attendant Godot.
0:42 Il ne viendra qu’au mois d’octobre.
0:45 Il arrive et ils se rencontrent
0:52 et au début tout se passe bien.
0:55 Gauguin fait très attention à ne pas
0:58 incommoder Vincent van Gogh
0:59 parce que c’est le frère du marchand qui
1:03 doit le tirer d’affaires et Théo se met
1:06 à vendre sans arrêt des toiles.
1:11 Gauguin voit l’argent qui commencent à tomber lui,
1:12 qui crevaient de faim et de misére
1:15 l’année d’avant, quand il était à la Martinique
1:18 et donc il essaie de faire attention
1:22 à ne pas faire de bêtises ;
1:25 mais il se met à discuter et
1:27 ils s’aperçoivent qu’en fait leur gout
1:31 ne correspond pas du tout là l’un aime
1:35 comme Gauguin aime aller dans l’imaginaire.
1:41 Il aime Séraphine tas ? de Balzac –
1:43 c’est un histoire de d’androgyne –
1:45 il aime des auteurs qui vont vers l’imaginaire.
1:50 Et van Gogh pas du tout.
1:56 C’est Zola c’est Dickens c’est voila
2:01 Alors ils sont pas du tout d’accord en
2:05 peinture – il n’aime pas les mêmes choses
2:08 et par exemple Gauguin aime Raphaël, Ingres
2:18 tandis que l’autre n’aime pas du tout ces peintres la.
2:22 Lui, il aime d’autres peintres et puis alors
2:29 dans la facture il y a une chose radicalement
2:33 différente entre les deux.
2:37 Gauguin peint en aplats et van Gogh peint ?
2:44 avec des petits traits discontinus comme ça,
2:48 et il n’achève pas – c’est à dire
2:51 il peut meme laisser des blancs sur la toile.
2:54 Donc nous sommes au coeur du probleme
2:59 La facture et l’imaginaire ou non
3:04 dans la peinture alors Gauguin veut se liberer
3:09 d’autant plus du réel que dans sa facture
3:13 il est sage, tandis que van Gogh se
3:18 libère du réel par la facture ;
3:21 mais il ne peut pas s’en libérer ; il le garde en
3:23 face de lui de bout en bout. Alors ce qui s’est passé
3:27 c’est que il y a eu ça cette opposition
3:29 entre les deux peintres et le fait que
3:33 Gauguin voyez en Vincent van Gogh un
3:39 peintre secondaire qui avaient certes des qualités
3:43 mais qui n’était pas plus talenteuex
3:45 que Charles Laval, que Emile Schuffenecker,
3:51 que Emile Bernard etc etc et d’autres
3:55 peintres qu’il avait connus qui ont été
3:57 ses élèves et il va convaincre van Gogh
4:04 de peindre comme lui – c’est à dire
4:08 de peindre de tête –
4:10 c’est à dire un partir de l’imaginaire
4:12 et non plus à partir de l’objet.
4:18 Et on a d’ailleurs toute une série de lettres
4 :22 ou Vincent van Gogh explique que Gauguin
4:25 l’a convaincu de faire ci, de faire ça
4:30 et c’est tout ce qu’il est, tout ce qui
4:33 l’a mené jusque-là dix ans de
4:35 recherches pour mettre au point cette
4:37 technique et cette façon de peindre
4:42 qui sont détruites et là ça va
4:46 le la fragilité psychologique de
4:54 van Gogh va le conduire au drame.
5:01 Il va perdre ses repères et sa personnalité.
5:04 Le peu de choses qui la tenait à peu
5:07 près en équilibre va voler en éclats.
5:10 Il passe très très mal – à ce moment là
5:14 Gauguin ecrit alors a Theo et lui explique
5:17 qu’il y a une incompatibilité d’humeur
5:21 totale entre lui et Vincent et qu’il doit
5:26 absolument rentrer à Paris.
5:29 Et il lui demande de lui envoyer l’argent de
5:31 ses tableaux vendus pour qu’ils puissent partir.
5:33 Il lui donne tout l’argent qu’ils
5:36 lui devaient pour toutes les ventes de
5:39 tableaux est en réalité
5:41 Gauguin perd son marchand
5:44 à ce moment la, ce qui va lui valoir
5:49 une période de plus de 11 ans d’horreur
5:53 absolue et de misère épouvantable.
5:58 Arles est donc une catastrophe pour van Gogh
6:02 et c’en est une aussi pour Gauguin.
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Paul Gauguin – Les Grands Maîtres de la Peinture
https://www.youtube.com/watch?v=kefOklSr2AQ&t=1649s
dans sa peinture gauguin exprime sa liberté à
19:21 l’état pur trouver de nouvelles expressions artistiques doit passer selon lui par la découverte
19:27 et l’apprentissage de nouvelles sources une d’entre elles portent le nom de vincent van gogh
19:34 [Musique]
19:47 ils vont séjourner ensemble à arles pour beaucoup parlé de leurs recherches artistiques de leurs idées de leurs
19:54 convictions même si ça tourne mal c’est un moment décisif dans la vie et la carrière artistique
de l’un et de l’autre
20 :01 Paysages près d’Arles 1888 [Musique]
20:18 en arles gauguin et van gogh cohabitent et peignent ensemble cette peinture sur
20:23 arles est importante et unique elle montre tout l’influencent de van
20:28 gogh bien que gauguin défendent farouchement son propre style et le caractère personnel de
20:34 de cette œuvre certains affirment même qu’il est parfaitement capable de s’approprier
20:40 ce dont il a besoin dans les méthodes du grand peintre les lavandières 1888
20:51 [Musique] autoportrait dit les misérables 1888
20:59 trop mélancolique et peint à la va vite tels sont les mots employés par van gogh
21:05 pour décrire ce tableau c’est sur sa demande et malgré son opinion que
21:11 gauguin essayent vainement de réussir une composition audacieuse et un savant mariage
21:20 de couleurs les deux peintres 10-q de voyage et de leur amour commun de l’exotisme
21:31 il parle du 22 décembre mais il n’existe aucune certitude sur le fait que gauguin et poussé
21:38 van gogh à se couper l’oreille van gogh se réfugie dans un asile peu après [Musique]
21:50 arlésienne mistral 1888 perturbé par les événements survenus
21:55 à son ami gauguin continue à peindre [Musique]
22:30 nature morte au jambon 1889 alors que le style impressionniste de van gogh
22:37 gagne en popularité gauguin reste malgré tout fidèle au synthétisme
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Avant et Apres par Paul Gauguin
https://www.google.com/search?client=firefox-b-d&q=avant+et+apres+gres+gauguin
Voilà bien longtemps que j’ai envie d’écrire
sur Van Gogh et je le ferai certainement un beau
jour que je serai en train : pour le moment je vais
raconter à son sujet, ou pour mieux dire à notre
sujet, certaines choses aptes à faire cesser une
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erreur qui a circulé dans certains cercles.
Le hasard, sûrement, a fait que durant mon
existence plusieurs hommes qui m’ont fréquenté
et discuté avec moi sont devenus fous.
Les deux frères Van Gogh sont dans ce cas et
quelques-uns mal intentionnés, d’autres avec
naïveté m’ont attribué leur folie. Certainement
quelques-uns peuvent avoir plus ou moins
d’ascendant sur leurs amis, mais de là à
provoquer la folie, il y a loin. Bien longtemps
après la catastrophe, Vincent m’écrivit de la
maison de santé où on le soignait. Il me disait :
« Que vous êtes heureux d’être à Paris. C’est
encore là où se trouvent les sommités, et
certainement vous devriez consulter un
spécialiste pour vous guérir de la folie. Ne le
sommes-nous pas tous ? » Le conseil était bon,
c’est pourquoi je ne l’ai pas suivi, par
contradiction sans doute.
Les lecteurs du Mercure ont pu voir dans une
lettre de Vincent, publiée il y a quelques années,
l’insistance qu’il mettait à me faire venir à Arles
pour fonder à son idée un atelier dont je serais le
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directeur.
Je travaillais en ce temps à Pont-Aven en
Bretagne et soit que mes études commencées
m’attachaient à cet endroit, soit que par un vague
instinct je prévoyais un quelque chose d’anormal,
je résistai longtemps jusqu’au jour où, vaincu par
les élans sincères d’amitié de Vincent, je me mis
en route.
J’arrivai à Arles fin de nuit et j’attendis le petit
jour dans un café de nuit. Le patron me regarda et
s’écria : « C’est vous le copain ; je vous
reconnais. »
Un portrait de moi que j’avais envoyé à
Vincent et suffisant pour expliquer l’exclamation
de ce patron. Lui faisant voir mon portrait,
Vincent lui avait expliqué que c’était un copain
qui devait venir prochainement.
Ni trop tôt, ni trop tard, j’allai réveiller
Vincent. La journée fut consacrée à mon
installation, à beaucoup de bavardages, à de la
promenade pour être à même d’admirer les
beautés d’Arles et des Arlésiennes dont, entre
parenthèse, je n’ai pu me décider à être
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enthousiaste.
Dès le lendemain nous étions à l’ouvrage ; lui
en continuation et moi à nouveau. Il faut vous
dire que je n’ai jamais eu les facilités cérébrales
que les autres sans tourment trouvent au bout de
leur pinceau. Ceux-là débarquent du chemin de
fer, prennent leur palette et, en rien de temps,
vous campent un effet de soleil. Quand c’est sec
cela va au Luxembourg, et c’est signé Carolus
Duran.
Je n’admire pas le tableau mais j’admire
l’homme.
Lui si sûr, si tranquille.
Moi si incertain, si inquiet.
Dans chaque pays, il me faut une période
d’incubation, apprendre chaque fois, l’essence
des plantes, des arbres, de toute la nature enfin, si
variée et si capricieuse, ne voulant jamais se faire
deviner et se livrer.
Je restai donc quelques semaines avant de
saisir clairement la saveur âpre d’Arles et ses
environs. N’empêche qu’on travaillait ferme,
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surtout Vincent. Entre deux êtres, lui et moi, l’un
tout volcan et l’autre bouillant aussi, mais en
dedans il y avait en quelque sorte une lutte qui se
préparait.
Tout d’abord je trouvai en tout et pour tout un
désordre qui me choquait. La boîte de couleurs
suffisait à peine à contenir tous ces tubes pressés,
jamais refermés, et malgré tout ce désordre, tout
ce gâchis, un tout rutilait sur la toile ; dans ses
paroles aussi. Daudet, de Goncourt, la Bible
brûlaient ce cerveau de Hollandais. À Arles, les
quais, les ponts et les bateaux, tout le midi
devenait pour lui la Hollande. Il oubliait même
d’écrire le hollandais et comme on a pu voir par
la publication de ses lettres à son frère, il
n’écrivait jamais qu’en français et cela
admirablement avec des tant que quant à à n’en
plus finir.
Malgré tous mes efforts pour débrouiller dans
ce cerveau désordonné une raison logique dans
ses opinions critiques, je n’ai pu m’expliquer tout
ce qu’il y avait de contradictoire entre sa peinture
et ses opinions. Ainsi, par exemple, il avait une
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admiration sans bornes pour Meissonier et une
haine profonde pour Ingres. Degas faisait son
désespoir et Cézanne n’était qu’un fumiste.
Songeant à Monticelli il pleurait.
Une de ses colères c’était d’être forcé de me
reconnaître une grande intelligence, tandis que
j’avais le front trop petit, signe d’imbécillité. Au
milieu de tout cela une grande tendresse ou plutôt
un altruisme d’Évangile.
Dès le premier mois je vis nos finances en
commun prendre les mêmes allures de désordre.
Comment faire ? la situation était délicate, la
caisse étant remplie modestement par son frère
employé dans la maison Goupil ; pour ma part en
combinaison d’échange en tableaux. Parler : il le
fallait et se heurter contre une susceptibilité très
grande. Ce n’est donc qu’avec beaucoup de
précautions et bien des manières câlines peu
compatibles avec mon caractère que j’abordai la
question. Il faut l’avouer, je réussis beaucoup
plus facilement que je ne l’avais supposé.
Dans une boîte, tant pour promenades
nocturnes et hygiéniques, tant pour le tabac, tant
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aussi pour dépenses impromptu y compris le
loyer. Sur tout cela un morceau de papier et un
crayon pour inscrire honnêtement ce que chacun
prenait dans cette caisse. Dans une autre boîte le
restant de la somme divisée en quatre parties pour
la dépense de nourriture chaque semaine. Notre
petit restaurant fut supprimé et un petit fourneau
à gaz aidant, je fis la cuisine tandis que Vincent
faisait les provisions, sans aller bien loin de la
maison. Une fois pourtant Vincent voulut faire
une soupe, mais je ne sais comment il fit ses
mélanges. Sans doute comme les couleurs sur ses
tableaux. Toujours est-il que nous ne pûmes la
manger. Et mon Vincent de rire en s’écriant :
« Tarascon ! la casquette au père Daudet. » Sur le
mur, avec de la craie, il écrivit :
Je suis Saint-Esprit.
Je suis sain d’esprit.
Combien de temps sommes-nous restés
ensemble ? je ne saurais le dire l’ayant totalement
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oublié. Malgré la rapidité avec laquelle la
catastrophe arriva ; malgré la fièvre de travail qui
m’avait gagné, tout ce temps me parut un siècle.
Sans que le public s’en doute, deux hommes
ont fait là un travail colossal utile à tous deux.
Peut-être à d’autres ? Certaines choses portent
leur fruit.
Vincent, au moment où je suis arrivé à Arles,
était en plein dans l’école néo-impressionniste, et
il pataugeait considérablement, ce qui le faisait
souffrir ; non point que cette école, comme toutes
les écoles, soit mauvaise, mais parce qu’elle ne
correspondait pas à sa nature, si peu patiente et si
indépendante.
Avec tous ses jaunes sur violets, tout ce travail
de complémentaires, travail désordonné de sa
part, il n’arrivait qu’à de douces harmonies
incomplètes et monotones ; le son du clairon y
manquait.
J’entrepris la tâche de l’éclairer ce qui me fut
facile car je trouvai un terrain riche et fécond.
Comme toutes les natures originales et marquées
au sceau de la personnalité, Vincent n’avait
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aucune crainte du voisin et aucun entêtement.
Dès ce jour mon Van Gogh fit des progrès
étonnants ; il semblait entrevoir tout ce qui était
en lui et de là toute cette série de soleils sur
soleils, en plein soleil.
Avez-vous vu le portrait du poète ?
La figure et les cheveux jaunes de chrome.
Le vêtement jaune de chrome 2.
La cravate jaune de chrome 3 avec une épingle
émeraude vert émeraude sur un fond jaune de
chrome n° 4.
C’est ce que me disait un peintre Italien et il
ajoutait :
– Mârde, mârde, tout est jaune : je ne sais plus
ce que c’est que la pintoure.
Il serait oiseux ici d’entrer dans des détails de
technique. Ceci dit pour vous informer que Van
Gogh sans perdre un pouce de son originalité a
trouvé de moi un enseignement fécond. Et chaque
jour il m’en était reconnaissant. Et c’est ce qu’il
veut dire quand il écrit à M. Aurier qu’il doit
beaucoup à Paul Gauguin.
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Quand je suis arrivé à Arles, Vincent se
cherchait, tandis que moi beaucoup plus vieux,
j’étais un homme fait. À Vincent je dois quelque
chose, c’est, avec la conscience de lui avoir été
utile, l’affermissement de mes idées picturales
antérieures puis dans les moments difficiles me
souvenir qu’on trouve plus malheureux que soi.
Quand je lis ce passage : le dessin de Gauguin
rappelle un peu celui de Van Gogh, je souris.
Dans les derniers temps de mon séjour,
Vincent devint excessivement brusque et bruyant,
puis silencieux. Quelques soirs je surpris Vincent
qui levé s’approchait de mon lit.
À quoi attribuer mon réveil à ce moment ?
Toujours est-il qu’il suffisait de lui dire très
gravement :
« Qu’avez-vous Vincent », pour que, sans mot
dire, il se remît au lit pour dormir d’un sommeil
de plomb.
J’eus l’idée de faire son portrait en train de
peindre la nature morte qu’il aimait tant des
Tournesols. Et le portrait terminé il me dit :
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« C’est bien moi, mais moi devenu fou. »
Le soir même nous allâmes au café. Il prit une
légère absinthe.
Soudainement il me jeta à la tête son verre et
le contenu. J’évitai le coup et le prenant à bras le
corps je sortis du café, traversai la place Victor[1]Hugo et quelques minutes après Vincent se
trouvait sur son lit où en quelques secondes il
s’endormit pour ne se réveiller que le matin.
À son réveil, très calme, il me dit : « Mon cher
Gauguin, j’ai un vague souvenir que je vous ai
offensé hier soir.
- – Je vous pardonne volontiers et d’un grand
cœur, mais la scène d’hier pourrait se produire à
nouveau et si j’étais frappé je pourrais ne pas être
maître de moi et vous étrangler. Permettez-moi
donc d’écrire à votre frère pour lui annoncer ma
rentrée. »
Quelle journée, mon Dieu !
Le soir arrivé j’avais ébauché mon dîner et
j’éprouvai le besoin d’aller seul prendre l’air aux
senteurs des lauriers en fleurs. J’avais déjà
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traversé presque entièrement la place Victor[1]Hugo, lorsque j’entendis derrière moi un petit pas
bien connu, rapide et saccadé. rapide et saccadé. Je me retournai au
moment même où Vincent se précipitait sur moi
un rasoir ouvert à la main. Mon regard dut à ce
moment être bien puissant car il s’arrêta et
baissant la tête il reprit en courant le chemin de la
maison.
Ai-je été lâche en ce moment et n’aurais-je pas
dû le désarmer et chercher à l’apaiser ? Souvent
j’ai interrogé ma conscience et je ne me suis fait
aucun reproche.
Me jette la pierre qui voudra.
D’une seule traite je fus à un bon hôtel d’Arles
où après avoir demandé l’heure je retins une
chambre et je me couchai.
Très agité je ne pus m’endormir que vers 3
heures du matin et je me réveillai assez tard vers
7 heures et demie.
En arrivant sur la place je vis rassemblée une
grande foule. Près de notre maison des
gendarmes, et un petit monsieur au chapeau
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melon qui était le commissaire de police.
Voici ce qui s’était passé.
Van Gogh rentra à la maison et
immédiatement se coupa l’oreille juste au ras de
la tête. Il dut mettre un certain temps à arrêter la
force de l’hémorragie, car le lendemain de
nombreuses serviettes mouillées s’étalaient sur
les dalles des deux pièces du bas. Le sang avait
sali les deux pièces et le petit escalier qui montait
à notre chambre à coucher.
Lorsqu’il fut en état de sortir, la tête
enveloppée d’un béret basque tout à fait enfoncé,
il alla tout droit dans une maison où à défaut de
payse on trouve une connaissance, et donna au
factionnaire son oreille bien nettoyée et enfermée
dans une enveloppe. « Voici, dit-il, en souvenir
de moi », puis s’enfuit et rentra chez lui où il se
coucha et s’endormit. Il eut le soin toutefois de
fermer les volets et de mettre sur une table près
de la fenêtre une lampe allumée.
Dix minutes après toute la rue accordée aux
filles de joie était en mouvement et on jasait sur
l’événement.
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J’étais loin de me douter de tout cela lorsque
je me présentai sur le seuil de notre maison et
lorsque le monsieur au chapeau melon me dit à
brûle-pourpoint, d’un ton plus que sévère.
« Qu’avez-vous fait, Monsieur, de votre
camarade. » – Je ne sais…
– Que si… vous le savez bien… il est mort. »
Je ne souhaite à personne en pareil moment, et
il me fallut quelques longues minutes pour être
apte à penser et comprimer les battements de mon
cœur.
La colère, l’indignation, la douleur, aussi et la
honte de tous ces regards qui déchiraient toute ma
personne, m’étouffaient et c’est en balbutiant que
je dis : « C’est bien, Monsieur, montons et nous
nous expliquerons là-haut. » Dans le lit Vincent
gisait complètement enveloppé par les draps,
blotti en chien de fusil : il semblait inanimé.
Doucement, bien doucement, je tâtai le corps
dont la chaleur annonçait la vie assurément. Ce
fut pour moi comme une reprise de toute mon
intelligence et de mon énergie.
Presqu’à voix basse je dis au commissaire de
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police : « Veuillez, Monsieur, réveiller cet
homme avec beaucoup de ménagements et s’il
demande après moi dites-lui que je suis parti pour
Paris : ma vue pourrait peut-être lui être
funeste. »
Je dois avouer qu’à partir de ce moment, ce
commissaire de police fut aussi convenable que
possible, et intelligemment il envoya chercher un
médecin et une voiture.
Une fois réveillé, Vincent demanda après son
camarade, sa pipe et son tabac, songea même à
demander la boîte qui était en bas et contenait
notre argent. Un soupçon sans doute ! qui
m’effleura étant déjà armé contre toute
souffrance.
Vincent fut conduit à l’hôpital ou aussitôt
arrivé, son cerveau recommença à battre la
campagne.
Tout le reste, on le sait dans le monde que cela
peut intéresser et il serait inutile d’en parler, si ce
n’est cette extrême souffrance d’un homme qui
soigné dans une maison de fous, s’est vu par
intervalles mensuels reprendre la raison
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suffisamment pour comprendre son état et
peindre avec rage les tableaux admirables qu’on
connaît.
La dernière lettre que j’ai eue était datée
d’Auvers près Pontoise. Il me disait qu’il avait
espéré guérir assez pour venir me retrouver en
Bretagne, mais qu’aujourd’hui il était obligé de
reconnaître l’impossibilité d’une guérison.
« Cher maître (la seule fois qu’il ait prononcé
ce mot), il est plus digne après vous avoir connu
et vous avoir fait de la peine, de mourir en bon
état d’esprit qu’en état qui dégrade. »
Et il se tira un coup de pistolet dans le ventre
et ce ne fut que quelques heures après, couché
dans son lit et fumant sa pipe, qu’il mourut ayant
toute sa lucidité d’esprit, avec amour pour son art
et sans haine des autres.
Dans les monstres Jean Dolent écrit :
« Quand Gauguin dit : « Vincent », sa voix est
douce.
Ne le sachant pas, mais l’ayant deviné. Jean
Dolent a raison. On sait pourquoi.
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Gauguin et Van Gogh : la cohabitation
Ces deux célèbres peintres qui vécurent à la fin du 19e siècle étaient très amis, au point de décider de créer un communauté d’artistes avant-gardistes ensemble. Ainsi, en octobre 1888, Gauguin rejoint Van Gogh à Arles dans la « Maison Jaune » qu’il loue, où il reste un peu plus de deux mois.
Les deux amis vivent alors ensemble : ils partagent les frais, boivent beaucoup d’absinthe et peignent tous deux les mêmes sujets. Van Gogh notamment est très prolixe (verbose). Malheureusement, leur relation finit par se dégrader et la cohabitation à ne plus se passer aussi bien : les rapports (relationships) sont déséquilibrés – Van Gogh aurait eu tendance à profiter de Gauguin, piochant (dipping into) dans son argent, ne participant pas aux corvées ménagères (household chores)…
Mais c’est surtout sur une querelle de nature artistique que les choses se gâtent (things go wrong), le 23 décembre 1888, après une violente discussion sur la peinture lors de laquelle Gauguin soutient qu’il faut travailler d’imagination, et Van Gogh d’après la nature…

L’épisode de l’oreille
Les choses se seraient alors envenimées (would have escalated). D’après le témoignage de Gauguin. Van Gogh l’aurait menacé d’un couteau ; ce dernier, effrayé (frightened), aurait alors tout de suite quitté les lieux. Van Gogh, se retrouvant seul, et pris d’un accès de folie (in a fit of madness), se serait alors coupé un morceau de l’oreille gauche à l’aide d’un rasoir, avant de l’envelopper dans du papier journal et de l’amener à une prostituée qu’il voyait régulièrement, une certaine Rachel. Il se serait ensuite tout simplement couché. La police ne l’aurait trouvé que le lendemain, la tête ensanglantée et l’esprit embrouillé (confused). Gauguin leur aurait alors expliqué les faits avant de quitter définitivement Arles – ce serait ainsi la dernière fois qu’ils se seraient vus.
Une autre thèse est cependant soutenue par deux universitaires allemands, Hans Kaufmann et Rita Wildegans. Lors de la dispute, ce ne serait pas Van Gogh qui se serait coupé l’oreille, mais Gauguin (qui était maître d’arme) qui le lui aurait tranché involontairement avec son sabre. Lui qui souhaitait juste lui faire peur aurait eu ce geste malheureux… Gauguin se serait ensuite enfui et aurait jeté l’arme dans le Rhône (en effet, la lame n’a plus jamais été en sa possession par la suite). Peu de documents permettent d’étayer réellement une thèse ou l’autre : le mystère reste donc entier !
En 1901 à Tahiti, Gauguin peindra cependant des tournesols, dernier hommage, remord peut-être, à son ami obsédé par ces fleurs et leur couleur…

Pour aller plus loin… des artistes emblématiques
Né en 1848, Paul Gauguin est un des pères de l’Art moderne. Son utilisation de la couleur, notamment, révolutionna le cours de la peinture et influença énormément des artistes comme Matisse ou Picasso. Homme de caractère, il eut une vie mouvementée et passionnante, successivement banquier, ouvrier pendant le percement du canal de Panama, peintre en Bretagne puis à Tahiti…
Le peintre néerlandais Vincent Van Gogh (1853 – 1890), lui aussi, est un artiste majeur dans l’histoire de la peinture. Cet homme qui vécut dans la pauvreté et la folie avait néanmoins de nombreux amis, parmi lesquels son frère Théo, le peintre Émile Bernard et surtout, Paul Gauguin… Son destin s’achèvera en 1890 lorsqu’il choisit de se tirer une balle dans la poitrine, mettant ainsi fin à des crises psychotiques de plus en plus fréquentes.
Ils explorèrent ainsi tous deux les possibilités de la couleur, bien avant les expérimentations des avant-gardes du début du 20e siècle.
https://www.kazoart.com/blog/gauguin-et-van-gogh-une-amitie-explosive/
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Vincent Van Gogh, qui peignait de nombreux paysages souhaitait se consacrer également aux portraits et recherchait donc un modèle. C’est ainsi qu’il a rencontré le facteur Joseph Roulin (1841-1903) qui fréquentait comme lui le café de la Gare, sa femme Augustine Pellicot (1851-1930) et leurs trois enfants : Armand, Camille et Marcelle.
En décembre 1888, V van Gogh commence un portrait de Madame Roulin. En mars 1889, il avait terminé quatre versions supplémentaires. Cette version était probablement destinée à P Gauguin. Contrairement à la création de trois versions de sa chambre à coucher, van Gogh a peint cinq images de Madame Roulin comme La Berçeuse parce qu’il voulait “assurer la disponibilité de son meilleur travail à tous ceux qui pourraient vouloir”.
Dans le contexte d’un envoi à P Gauguin après leur séparation, le tableau de la Berceuse était destiné à être flanqué de deux peintures de tournesols. Dans une lettre de mai 1889 à Théo, Vincent esquisse cet arrangement, expliquant que “les tons jaune et orange de la tête vont gagner en éclat par la proximité des ailes jaunes. Et alors vous comprendrez ce que je vous ai écrit, que mon idée avait été de faire une sorte de décoration … “.
L’intérêt continu de V van Gogh pour les couleurs complémentaires est évident dans la juxtaposition contrastée de la jupe vert émeraude de Madame Roulin et de son sombre corsage couleur olive, alors que ses cheveux sont orange, la chaise de couleur rouille et le plancher vermillon. L’alliance du rouge et du vert est renforcée par le papier peint à fleurs, dérivé d’un auto-portrait de P Gauguin, qui ajoute des touches de bleu et d’orange.
Assise dans un fauteuil rustique, Madame Roulin regarde au loin. Ses mains se chevauchent les unes les autres et saisissent la corde légèrement grossière au bord inférieur de la toile, celle-ci renvoyant au berçeau (invisible ici) qu’il s’agit de faire balancer par ce moyen. V van Gogh a peint ces cinq versions de La Berceuse à un moment où il avait besoin d’être apaisé, ce motif ayant dû lui offrir un grand réconfort après le départ de P Gauguin (cf. frenchart.umsl.edu).
Pour voir les tableaux composés sur le même motif en décembre 1888, février et mars 1889 :
www.flickr.com/photos/7208148@N02/16605390546/in/album-72…
www.flickr.com/photos/7208148@N02/22578502943/in/datepost…
www.flickr.com/photos/7208148@N02/22774888917/in/album-72…
www.flickr.com/photos/7208148@N02/16465540069/in/album-72…
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L’influence de van Gogh et Gauguin l’un sur l’autre ? reponse par chat.openai.com
Les artistes Paul Gauguin et Vincent van Gogh ont eu une influence significative l’un sur l’autre pendant leur amitié, mais il est difficile de dire qui a eu le plus d’influence sur l’autre.
En 1888, Gauguin a rejoint Van Gogh à Arles, en France, et les deux artistes ont passé neuf semaines à travailler ensemble. Pendant ce temps, ils ont échangé des idées sur l’art et ont développé leurs styles respectifs. Van Gogh a été influencé par l’utilisation de couleurs vives et de formes simplifiées de Gauguin, tandis que Gauguin a été inspiré par la touche expressive et l’intensité émotionnelle de Van Gogh.
Il convient de noter que Van Gogh avait déjà développé son propre style avant l’arrivée de Gauguin à Arles. Cependant, l’influence de Gauguin sur Van Gogh est visible dans des œuvres telles que “Le café de nuit”, qui présente une utilisation similaire de couleurs vives et de coups de pinceau audacieux.
D’autre part, Gauguin a été influencé par l’intensité émotionnelle de Van Gogh et sa volonté d’expérimenter de nouveaux styles. Cela peut être vu dans les œuvres ultérieures de Gauguin, qui présentent des couleurs plus audacieuses et des coups de pinceau plus expressifs. Leur amitié a été un échange artistique mutuellement bénéfique.
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Lise Martinot, historienne pas comme les autres, donnera des mini conférences d’histoire de l’art en français et en anglais. Redécouvrez les ?uvres des plus grands maîtres analysées sous un angle nouveau et accessible à tous.
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Gauguin vs van Gogh – Histoire d’une incompatibilité spirituelle. [ Art d’Histoire 1/4 ]
Voir – https://www.youtube.com/watch?v=Ql5KZj8SMhA
Quand les différents spirituels, désavouent la communion artistique.
The Search for sacred Art de Debora Silverman est à l’origine de cette conférence. Le drame qui mit fin à la communauté d’artistes formée par van Gogh et Gauguin, “le fameux épisode de l’oreille coupée” a trop souvent été justifié par l’insanité mentale de van Gogh et l’arrogance de Gauguin ; il n’en reste pas moins qu’une lecture approfondie de leurs œuvres au regard de leur foi laissait présumer d’une profonde incompatibilité de sensibilité.
1 – Le ténébreux contre le lumineux :
La communauté rêvée par van Gogh et forcée chez Gauguin devait rassembler autour de ces derniers les amis de Bretagne : Émile Bernard et Charles Laval. Dans l’attente de cette aventure, ils s’échangèrent leurs portraits.
L’étude comparée du portrait en bonze de van Gogh dédié à Gauguin et du portrait en retour de Paul dédié à l’ami Vincent manifeste déjà de deux caractères radicalement opposés, l’un paisible et rayonnant, l’autre tourmenté et bouillonnant. Au sortir de cette aventure, Gauguin prit la fuite tandis que van Gogh restait définitivement seul.
Démonstration à partir du portrait dédié à l’ami P. Gauguin de van Gogh et de celui de Gauguin en misérable avec portrait d´Émile Bernard, analysés au regard de leurs courriers échangés entre septembre 1888 et janvier 1889.
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Gauguin vs van Gogh – Histoire d’une incompatibilité spirituelle. [ Art d’Histoire 2/4 ]
Voir = https://www.youtube.com/watch?v=jIvqLdDlsto
L’atelier d’Arles : Gauguin en octobre 1888 débarque en terre arlésienne sans jamais succomber à ses charmes. Van Gogh l’accueille tentant, tant bien que mal d’absorber les bases de son enseignement. L’analyse comparée de leurs Alyscamps puis de leur Vendanges, deux séries peintes côte à côte, l’une devant le motif en extérieur, l’autre de mémoire en atelier est à ce titre exemplaire ;
les deux peintres affirment alors par leur choix de perspective, de couleur et de facture, deux natures artistiques systématiquement antinomiques. Une étude formelle approfondie rendra tangible leur impénétrabilité réciproque. Démonstration à partir de la série des Alyscamps de Gauguin et van Gogh ; ainsi que La vigne rouge de van Gogh et Vendange à Arles ou Misère humaine et En pleine Chaleur ou Les Cochons de Gauguin.
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Gauguin vs van Gogh – Gauguin chez Monseigneur Dupanloup : [ Art d’Histoire 3/4 ]
Voir – https://www.youtube.com/watch?v=LehXksbi27U&t=90s
Gauguin chez Monseigneur Dupanloup : On mystifie Gauguin, on l’érige en Pygmalion intransigeant, en précurseur de l’art moderne. Il fut aussi un petit séminariste sous le très influent Monseigneur Dupanloup, grand réformateur du catéchisme moderne. Et étonnamment, les œuvres de Gauguin se prêtent à l’illustration, au pied de la lettre, d’un grand nombre des textes de Dupanloup. Au regard des enseignements de l’évêque seront analysées quelques œuvres de Gauguin, ses Vendanges à nouveau, ses Êves bretonnes et exotiques, et la Vision après le Sermon ; apparait une inattendue résonance du plus iconoclaste de notre peintres modernes avec la très traditionnelle foi catholique.[ Art d’Histoire 2/4 ]
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Gauguin vs van Gogh – Les peintures Bibliques d´Émile Bernard et Paul Gauguin : [ Art d’Histoire 4/4 ]
Voir – https://www.youtube.com/watch?v=yFh-GRxEWvI
Mages prosternés devant l’enfant Jésus, anges ailés, visions de Jeanne d’Arc, autant de peintures par Bernard et Gauguin qui exaspérèrent l’ami hollandais ; van Gogh resta réfracteur au surnaturel que sa culture protestante abhorrait, il s’attristait de leurs égarements, lui le réaliste. Heureusement il n’eut l’occasion de voir le chef d’œuvre religieux de Gauguin.
Gauguin peignit au terme de sa vie, une immense frise faisant écho mot pour mot au questionnement intérieur de Mgr Dupanloup; ce qui signifie qu’au plus fort de sa période anticléricale, Gauguin pratiquait encore les méthodes spirituelles inculquées par les Catholiques. Démonstration autour des peintures bibliques de Bernard et Gauguin de 1889-1890 et de D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous? de Gauguin.
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My dear old Bernard,